Par Guillermo Alvarado
En France, la Cour de Justice de la République vient d'émettre un curieux verdict de culpabilité contre Christine Lagarde, ancienne ministre d'Économie et des Finances et actuellement directrice du Fonds Monétaire International, le FMI. Elle a été condamnée par négligence mais exemptée de purger une peine de prison en raison de “ sa personnalité et de sa réputation internationale”.
Le verdict a diverses lectures, quelques unes très préoccupantes. Par exemple le fait qu'une personne, en fonction de l'importance de la charge qu'elle occupe, peut être pardessus la loi à tel point que sa culpabilité soit reconnue, mais qu'elle ne soit pas obligée de purger une peine de prison.
La Cour de Justice de la République n'est pas un tribunal quelconque dans ce pays européen, mais l'entité chargée de juger les crimes commis par des fonctionnaires publiques durant l'exercice de leur gestion. C'est peut être en raison de cette fonction qu'elle a pris une décision si inusitée.
Le procès contre Christine Lagarde a débuté il y a 5 ans suite au rôle qu'elle a joué dans une série de transactions obscures lorsqu'elle occupait le portefeuille d'Économie et des Finances sous le gouvernement de Nicolas Sarkozy, de 2007 à 2011.
À cette époque-là le magnat Bernard Tapie, ami intime du président français, avait un vieux litige avec le Crédit Lyonnais, banque étatique. Un procès était ouvert dans un tribunal courant comme c'était le cas.
Lorsque Lagarde a pris possession de sa charge, de commun accord avec Sarkozy elle a décidé de créer une cour privée d'arbitrage pour résoudre cette affaire. Celle-ci a déterminé que Bernard Tapie devait recevoir une indemnité de 408 millions d'Euros, une somme trop élevée. Ce verdit puait de partout.
Les questions que l'on se posait à l'époque étaient: pour quoi une ministre n'a pas confiance dans les tribunaux ordinaires de justice et elle préfère accepter un groupe d'arbitrage particulier?
Pourquoi Lagarde, censée de par son poste défendre les finances publiques a accepté de payer une indemnisation si démesurée à un homme d'affaires, au lieu de défendre les intérêts de l'État et de présenter un recours pour éviter un paiement si excessif?
En 2011, Lagarde a quitté son ministère pour remplacer à la tête du FMI Dominique Straus-Khan, qui a du démissionner suite à sa conduite sexuelle inappropriée.
Cela n'a pas empêché, l'ouverture, un an après, d'une enquête à son encontre qui dans un premier moment était centrée sur des éventuels délits de corruption.
Hier, finalement, elle a été condamnée par négligence dans l'exercice de ses fonctions. Cela en termes pénaux se traduirait par jusqu'à un an d'emprisonnement et une amende de 15 000 Euros. Mais voilà qu'elle a été pardonnée.
Le délit ne serait même pas inscrit dans son cassier judiciaire. Bénéfices dont ne jouissent pas d'autres personnes impliquées y compris Tapie qui peuvent aller en prison pendant plusieurs années pour les charges de détournement de fonds publics et arnaque.
Soit, être la directrice du FMI a ses grands avantages, soit les 3 juges français, les 6 députés et autant de sénateurs sont en train d'éviter un scandale à la veille des présidentielles et des législatives de l'année prochaine.
La seule réaction du Fonds Monétaire Internationale a été annoncer que dans le plus bref délai la direction générale se réunira “ pour analyser les derniers événements”. Il faudra voir si eux aussi décident être généreux avec Mme Lagarde, condamnée par la justice mais sans châtiment par son “prestige international”. Des choses réelles, ami Sancho, dirait ce grand défenseur de la justice, Don Quichotte.