La « conquête musicale » de nos peuples

Édité par Reynaldo Henquen
2023-04-27 19:33:31

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Les médias de masse s’imposent comme les bourreaux de notre temps pour, dans un sens, en rien figuré, réduire à néant toute velléité de résistance culturelle

Auteur: Oni Acosta Llerena | informacion@granmai.cu

Lorsque l’on parle de mondialisation, de colonisation et de culture hégémonique, l'histoire s’écrit toujours du côté de ceux qui la racontent parce que, de plus, ils disposent de l’imprimerie pour la rendre crédible. Ceci, pour dire qu’aujourd'hui tout l'attirail des ressources médiatiques disponibles vient s’ajouter aussi aux livres et à la littérature écrite des cultures de domination qui, pendant des siècles, a muselé toute œuvre émancipatrice depuis l’aspect multinational ou endogène.

Les médias de masse s’imposent comme les bourreaux de notre temps pour, dans un sens, en rien figuré, réduire à néant toute résistance culturelle. Mais cela se manifeste-t-il dans la musique de manière visible ? Indiscutablement oui, à partir du moment où certaines tendances se positionnent sur les passerelles promotionnelles qui induisent ou guident un public facile à séduire émotionnellement. Pour ce faire, les plateformes destinées à placer des contenus ont dû couper, de manière efficace, les liens sensoriels de ces audiences avec ces expressions qui, à un moment donné, ont fait partie de leur vécu et, logiquement, elles ont dû atteindre ce que nous appellerons un « orphelinat musical ».

Mais ce furent des pratiques qui comprenaient un scénario déjà lointain et qui, en raison des changements dans les flux de l’information, étaient de toute évidence déchiffrables pour les grands-publics. Il fallait donc repenser des stratégies basées sur l'incorporation de ces codes précédemment écartés, mais sans trop d'enthousiasme, sous peine de voir le manuel du conquérant culturel voler en éclats.

C’est alors que l'industrie – la dominante, bien sûr – a mis au point un léger travail d'approximation, de doses millimétriques de libération musicale de certaines esthétiques qui, si elles étaient bien pensées, fonctionneraient. Il y eut des précédents où, me semble-t-il, le marché n'a pas dépassé sa simple frontière d'accompagnement et a laissé le talent circuler, sans imposer de canons visibles, comme la chanson romantique des années 50 avec Nat King Cole, abordant des thèmes cubains en espagnol et enregistrés ici (se souvenir toujours du maestro Armando Romeu pour ces arrangements extraordinaires), ainsi que dans le jazz avec les formats orchestraux de Duke Ellington, Benny Goodman ou Glenn Miller.

Des changements importants allaient se produire dans les années 60 et 70, y compris lorsque le grand laboratoire du rock britannique débordait de créativité, mais sans aucun doute, le grand couplage et son emballage final ont été la lucrative industrie étasunienne et sa légitimation commerciale, sans laquelle il n'y aurait pas de « coup », sportivement parlant.

Comprenant que l'aliénation musicale est une arme aussi puissante que les projectiles dans une guerre, certains secteurs de la droite locale ont entamé un démembrement presque parfait d'éradication culturelle avec la traque, la censure ou l'assassinat d'auteurs-compositeurs-interprètes, aux idées socialistes ou communistes, imprégnés par le triomphe de la Révolution cubaine et son impact sur le continent. Victor Jara, Ali Primera, Caetano Veloso, Gilberto Gil, Mercedes Sosa et d'autres figuraient sur ces listes, et tandis que leurs chansons « non appropriées » étaient mises en attente, d'autres chanteurs remplissaient ces espaces.

C’est ainsi que de ces façons ou d’autres d'extorsion, de nombreuses expressions musicales latino-américaines ont cédé la place à des expressions issues de secteurs d'extrême droite ou fortement désidéologisées, volontairement déconnectées des luttes et tendances populaires antérieures, lesquelles ont commencé très tôt à imposer une banalité idiotisante que, à force de talent, nos peuples d'Amérique ont eu beaucoup de mal à surmonter. (Source Granma)



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