Photo : Estudios Revolución
La Havane, 3 juin (RHC) Pour Raúl, le pouvoir n'a jamais été une fin, mais une façon de servir la patrie. À plusieurs reprises au cours de sa vie révolutionnaire, il a laissé un héritage sans rien attendre en retour de la part de ses contemporains ou des générations futures.
Dans le court laps de temps qui s'est écoulé entre son retour d'Europe et l'assaut de la Moncada, Raúl s'est consacré à la préparation de l'action armée contre Batista. Fidel ne l'a pas informé des détails car le plan était totalement cloisonné. Quelques heures seulement avant l'opération, à la Granjita Siboney, il apprit qu'il irait avec cinq autres hommes s'emparer de l'immeuble du Palais de Justice, voisin de la caserne, pour appuyer l'offensive du groupe principal, dirigé par Fidel, par des tirs depuis les toits.
Un autre groupe, composé de 20 hommes et dirigé par Abel Santamaría, commandant en second du mouvement, doit s'emparer de l'hôpital qui jouxte l'arrière de la forteresse et neutraliser toute activité de la garnison dans ce secteur.
Raúl et ses camarades exécutent la première partie de l'ordre avec une relative facilité. Ils capturent d'abord un caporal qui passe dans la zone, puis le sergent du Palais de Justice qui vient leur ouvrir la porte et leur indique où se trouvent les gardes du bâtiment. Ils font prisonniers ces derniers et, après les avoir désarmés, les enferment avec les deux autres dans une pièce.
Avec d'autres combattants, Raúl monte sur le toit, d'où il a une bonne vue sur Moncada. Les combats ont déjà commencé, vers 5h15 du matin. La sirène d'alarme retentit dans la caserne. On entend les rafales d'une mitrailleuse qui, malheureusement, se trouve hors de portée des armes de ceux qui se trouvent sur le toit du Palais.
Le groupe ouvre le feu sur la caserne dans le but d'immobiliser les actions de la garnison. Raul tire avec un fusil Springfield, pris à l'un des soldats quelques instants plus tôt, et dont il a appris à se servir avec les gardes champêtres de Biran. Comme on le sait, le combat n'a duré qu'une quinzaine de minutes. L'effet de surprise ayant échoué, il était impossible, avec seulement une soixantaine d'hommes mal armés, de prendre la forteresse où se défendait un régiment complet de l'armée régulière. Fidel donne l'ordre de battre en retraite, ce que Raul et ses camarades observent depuis le toit.
Raúl ordonne également la retraite, mais reste encore quelques minutes à observer ce qui se passe dans la caserne. En descendant l'ascenseur du bâtiment, il s'aperçoit qu'une patrouille militaire est sur le point de s'emparer de ses camarades. Il se jette immédiatement sur le sergent qui les dirige, lui arrache son pistolet et ordonne aux soldats et à leur chef de se mettre à terre, ce qu'ils font sans résistance.
C'est un moment où se joue le destin d'un homme et de ses camarades, des moments qui, comme le dit la chanson du même nom de la série télévisée soviétique !17 instants d'un primtemps", « sifflent près de la tempe et apportent le déshonneur aux uns et l'immortalité aux autres ». Raul, en l'absence du commandement du chef de son groupe, a donné les bons ordres dès le début et a organisé la retraite au bon moment. Ainsi, de combattant de base, il devient le chef.
En quelques secondes, les assaillants se sont transformés d'arrêtés en escortes. Le malheureux sergent et les soldats qui l'accompagnent sont conduits dans la même pièce que les autres détenus. Ils ont reçu l'ordre de s'asseoir en silence jusqu'à ce que de nouvelles instructions soient données.
Raul ordonne à ses compagnons de prendre la voiture dans laquelle ils sont arrivés, de la démarrer et de l'attendre pendant qu'il cherche le chef de groupe. Après s'être assuré qu'il n'était pas là, ils se sont mis en route à toute vitesse. Après avoir fait plusieurs tours, ils sont arrivés à Ciudamar, un quartier côtier de Santiago de Cuba, où ils ont vu des vêtements qui traînaient dans la cour d'une maison et ont été obligés de les enlever pour se débarrasser de l'uniforme de l'armée dont étaient vêtus tous les assaillants ayant participé aux actions du 26 juillet.
Ils sont retournés au centre-ville et, en arrivant au parc Céspedes, l'un d'eux a suggéré d'aller chez Micaela Cominches, qu'il connaissait, où il était sûr qu'ils trouveraient une protection. Raúl, comme beaucoup d'autres, a décidé de chercher de l'aide auprès d'amis de ses parents.
Aucun membre de son groupe n'est mort au combat ou n'est tombé entre les griffes des forces de Batista au cours de ces quatre premières et terribles journées de répression, où les personnes soupçonnées d'avoir participé aux assauts ont été soumises aux tortures et aux assassinats les plus bestiaux.
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Deux mois auparavant, du 17 au 22 décembre 1975, le premier congrès du Parti communiste de Cuba s'était réuni à La Havane, adoptant la plate-forme programmatique de l'organisation, élisant les organes de direction du Parti, jusqu'alors constitués selon le principe de la cooptation, et approuvant d'autres documents importants.
Cette réunion importante s'est tenue au théâtre Karl Marx (...). L'honneur d'ouvrir les débats est revenu à Raúl Castro. En règle générale, les Cubains ont l'habitude de dédier les grandes activités politiques aux anniversaires importants de leur histoire. À cette occasion, Raúl a souligné que le congrès se tenait l'année du 50e anniversaire de la fondation du premier parti communiste de Cuba.
(...) Une place particulière dans les travaux du congrès a été occupée par l'élection de la nouvelle direction du Parti. Raúl a été élu deuxième secrétaire de l'organisation, poste qu'il occupait depuis la création de l'ORI. Dans son discours de clôture de l'événement, Fidel Castro a évoqué cette question en ces termes : « Il est connu que dans notre Parti et dans notre Révolution, il ne peut y avoir, et il n'y aura jamais, de familiarisme ; c'est bien connu ! Parfois, deux cadres se rencontrent : c'est le cas de Raúl et Vilma, et ils sont de la même famille. Et il y a d'autres cas d'autres camarades. Mais dans notre Parti, où le mérite doit toujours prévaloir, ni l'amitié ni la famille ne sont, ni ne seront jamais, des facteurs à prendre en considération (...).
Dans le cas du camarade Raúl, c'est vraiment un privilège pour moi qu'en plus d'être un extraordinaire cadre révolutionnaire, il soit aussi un frère. Il a acquis ces mérites dans la lutte et dès les premiers jours. Ses relations familiales l'ont aidé à l'enrôler dans le processus révolutionnaire, à l'inviter à la Moncada, mais lorsqu'une patrouille est arrivée à la Audiencia de Santiago de Cuba et les a faits prisonniers, si Raúl n'avait pas fait ce qu'il a fait à ce moment-là, Raúl n'existerait plus depuis longtemps, c'est-à-dire prendre le pistolet du chef de patrouille et faire prisonnier la patrouille qui les avait faits prisonniers. S'il n'avait pas fait cela, ils auraient tous été tués quelques heures plus tard à Moncada. Et ce fut le début. Et la prison, et l'exil, et l'expédition de Granma, et les temps difficiles, et le deuxième front, et le travail accompli pendant ces années.
Je le dis et je le souligne, parce qu'il est nécessaire d'exprimer à quel point, dans notre Révolution, le critère qui est et sera toujours le mérite, et jamais aucune considération d'amitié ou de famille. Nous, les Cubains, nous comprenons bien tout cela, mais il faut aussi que cela soit compris en dehors de notre pays.
Les paroles de Fidel ont été interrompues plus d'une fois par les applaudissements nourris des délégués, qui étaient bien conscients des mérites de Raúl.
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Raúl Castro appartient à la race des hommes d'État qui n'ont jamais aspiré à devenir la figure de proue de l'État ou du parti. Il a accueilli le leadership de Fidel Castro avec un naturel total et une foi infinie en lui, et a toujours tenu à souligner son rôle exceptionnel dans la révolution cubaine. Ensemble, ils ont formé un couple inséparable, dix fois plus fort que chacun d'entre eux séparément. Certains historiens les ont même comparés à Karl Marx et Friedrich Engels. (...)
Lorsque Fidel est tombé malade, Raúl avait 75 ans. Bien sûr, il était déjà un dirigeant très expérimenté, qui connaissait parfaitement les cadres du Parti et de l'État. (...)
Pour lui, le pouvoir n'a jamais été une fin en soi, mais une façon de servir son pays. À plusieurs reprises dans sa vie révolutionnaire, il a laissé des héritages sans rien attendre en retour de ses contemporains ou des générations futures.
(Extraits du livre Raúl Castro, un homme en révolution. Source : Granma )
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