L'on se souvient aujourd'hui au Mexique de l'assassinat, cela fait un an, de la journaliste Miroslava Breach, correspondante du quotidien La Jornada dans l'état mexicain de Chihuahua et un autre crime contre un professionnel de la presse vient d'être commis : celui du communicateur social Leobardo Vázquez qui a été criblé de balles à Veracruz, devenant ainsi le troisième à être abattu depuis le début de l'année dans ce pays.
Le journalisme est devenu l'une des professions les plus dangereuses dans un pays qui vit, supposément, dans une démocratie, mais où, en 2017, 12 journalistes ont été assassinés.
Les assassinats sont déplorables mais plus encore l'incompétence démontrée par les appareils de la police et de la justice qui n'ont pas pu ou n'ont pas voulu faire la lumière sur aucun des cas enregistrés.
En tout cas, les autorités s'obstinent à en rendre responsable le crime organisé mais l'organisation « Artículo 19 » qui suit de près la situation, a révélé que sur les 1986 agressions perpétrées ces 5 dernières années contre des journalistes, seules 8% ont été le fait de délinquants et 48% correspondent à des fonctionnaires publics.
Et c'est que les assassinats ne sont que la pointe de l'iceberg, sous laquelle s'accumule une série d'actes hostiles envers la presse qui vont, depuis des menaces, des insultes, des appels intimidatrices et des dénonciations pour de présumées diffamations jusqu'à des agressions physiques, des disparitions et bien sûr des assassinats.
Le mandat de Felipe Calderón, de 2006 à 2012, et celui de l'actuel président Enrique Peña Nieto, sont les plus sanglants de l'histoire récente du Mexique mais l'assassinat de journalistes a commencé avant.
Le 30 mai 1984 était tué de quatre balles dans le dos Manuel Buendía, un des meilleurs journalistes ayant existé dans ce pays. Cela a été considéré comme le premier assassinat de la narco-politique mexicaine.
Manuel Buendía avait démasqué plusieurs officiers de la CIA basés au Mexique. Il avait également découvert les liens entre José Antonio Zorrila qui était alors chef de la Direction Fédérale de la Sécurité, la ténébreuse police politique qui n'existe plus heureusement, et des bandes de trafiquants de drogues.
Il se peut que la différence entre cette époque là et l'époque actuelle réside dans le fait que Zorrila a été découvert 5 ans après et condamné à 35 ans de prison tandis que, de nos jours, l'impunité marque 99,6% des crimes.
Bien qu'il y ait des états plus dangereux que les autres, comme Veracruz, Guerrero,Puebla, Mexico, Oaxaca, Tamaulipas et Sinaloa, les agressions contre des journalistes se sont étendues à presque tout le territoire national.
Face aux critiques, le gouvernement a créé deux entités : le Parquet Spécial pour l'Attention aux Délits contre la Liberté d'Expression, en 2010 et le Mécanisme de Protection aux Journalistes et aux Défenseurs des Droits de l'Homme, en 2012, mais, dans la pratique, le phénomène ne fait qu'augmenter et personne ne doute plus du fait que, malheureusement, le Mexique est le pays le plus dangereux de notre continent pour exercer cette profession.