Par Guillermo Alvarado
Sebastian Piñera, aux portes du Palais de La Moneda, le 9 novembre 2012. Photo: AP
Lors d'un vote qualifié d'historique, la Chambre des Députés du Chili a approuvé ce mardi une accusation constitutionnelle donnant le feu vert à une procédure de destitution du président Sebastian Piñera.
Le président chilien est accusé d'avoir facilité la vente controversée d'une compagnie minière, conclue dans un paradis fiscal. L'affaire avait été révélée par l’enquête internationale des Pandora Papers.
Selon cette enquête, Sebastian Piñera aurai obtenu des avantages pour lui-même et pour sa famille de la vente du complexe minier Dominga, en profitant des privilèges que lui confère sa fonction.
La session de la Chambre des Députés a duré 23 heures, dont 14 ont été consacrées par Jaime Naranjo, député socialiste, à la présentation du cas en plénière.
Ce long discours avait pour but de porter le débat au-delà de minuit lundi, heure à laquelle se terminait la mise en quarantaine par Covid-19 de plusieurs législateurs dont les votes étaient indispensables pour atteindre le minimum requis par la loi.
Finalement, aux premières heures du mardi matin, le vote a eu lieu. 78 députés ont donné ainsi le feu vert pour l’enclenchement d’une procédure de destitution de Sebastian Piñera. 67 ont voté contre et 3 ont choisi de s'abstenir.
L'annonce du résultat a suscité la liesse dans divers secteurs de la société chilienne, mais l'affaire passe maintenant au Sénat. Deux tiers de la chambre haute devrait réaliser le désir de vastes secteurs de la société. Mais, cela semble difficile. Cette chambre est contrôlée par des élus apparentés au gouvernement.
Il est allégué qu'en 2010, neuf mois après avoir pris ses fonctions pour la première fois, la famille de Piñera a vendu un projet de construction de deux mines et d'un port à un ami proche pour 152 millions de dollars.
La transaction a été effectuée par l'intermédiaire d'un paradis fiscal situé dans les îles Vierges britanniques et elle a été convenue en trois versements, avec la clause controversée selon laquelle le troisième versement ne serait effectué que si le site, situé dans le nord du Chili, n'était pas déclaré zone protégée, comme le demandaient les organisations environnementales.
Ce dernier n'a jamais été fait, en fait, et les proches du président ont reçu tout leur argent comme prévu, malgré de multiples protestations, car la région est unique au monde pour sa biodiversité.
Malheureusement pour Sebastian Piñera, les détails de ce négoce pervers ont été révélés grâce aux Pandora Papers, une enquête menée par un consortium international de journalistes.
Le scandale a déjà fait sa première victime, le candidat officiel à la présidence lors des élections du 21 novembre, Sebastián Sichel, a fortement chuté dans les sondages.
Il est très peu probable que le Sénat condamne aussi le président Piñera, car la droite ne va pas se suicider politiquement en pleine élection, mais les faits restent dans l'histoire et montrent comment, pour cette classe sociale, les lois et l'éthique importent peu lorsque des intérêts économiques sont en jeu.