Présidence cubaine
Saint-Domingue, 25 mars (RHC) Le président cubain Miguel Díaz-Canel est intervenu samedi lors de la session de haut niveau du 28e Sommet ibéro-américain pour réaffirmer l'engagement de son pays en faveur de la solidarité et de la coopération.
Le président a réitéré la volonté de la plus grande des Antilles de contribuer à la réalisation d'une Ibéro-Amérique plus juste et plus durable.
Il s'est dit heureux de se trouver en République dominicaine, un pays si proche du sien en termes de géographie et d'histoire, d'autant plus que le 25 mars 1895, José Martí et Máximo Gómez ont signé le Manifiesto de Montecristi, qui sert encore de guide pour le maintien de l'indépendance.
Lors de cette réunion, Cuba aura également la responsabilité de représenter la communauté du Groupe des 77 + la Chine, dont elle assumera la présidence en 2023.
Discours du Président de la République de Cuba, Miguel Díaz-Canel Bermúdez, au XXVIIIe Sommet ibéro-américain
Votre Excellence Luis Abinader, président de la République dominicaine :
Votre Majesté Felipe VI :
Vos Excellences, chefs d'État et de gouvernement de l'Amérique latine ; chefs de délégation :
Votre Excellence Andrés Allamand, secrétaire général ibéro-américain :
Il est très émouvant de visiter la République dominicaine sœur, berceau d'un peuple généreux et noble, si étroitement liée à Cuba par la géographie et l'histoire que, dans certaines régions de nos pays, il est difficile de nous distinguer.
Au sommet de cette union se trouve le général Máximo Gómez Báez, né sur ces terres, qui est devenu le chef exceptionnel des forces mambisas (indépendantistes cubaines du 19e siècle) dans les luttes pour notre indépendance, raison pour laquelle à Cuba nous lui rendons un hommage permanent et sincère.
Le vieux Gómez, comme l'appelaient affectueusement le peuple et les troupes, grâce à son talent militaire incontestable et à son sens de la patrie qui dépassait les frontières dominicaines, a obtenu le grade de général de l'armée de libération cubaine lors d'un épisode transcendant que notre histoire reconnaît comme la première charge à la machette.
Dans ce combat légendaire, l'utilisation stratégique de cet outil de travail est entrée dans l’histoire pour devenir la plus cubaine des armes contre l'armée coloniale.
Cette puissante histoire cubaine et dominicaine a une résonance particulière ici, en un jour comme aujourd'hui. C'est le 25 mars 1895, il y a exactement 128 ans, que notre héros national José Martí et Máximo Gómez, général en chef de l'armée de libération, ont signé ce qui est connu sous le nom de Manifeste de Montecristi.
"Nous, Cubains - soulignait le texte – nous avons commencé la guerre, et nous, Cubains et Espagnols, nous la finirons. Ne nous maltraitez pas et vous ne serez pas maltraités. Respectez-nous et vous serez respectés. L'acier répond à l'acier, et l'amitié à l'amitié. Il n'y a pas de haine dans la poitrine antillaise".
Malgré le temps écoulé, le Manifeste de Montecristi continue d'être une référence historique dans notre lutte permanente pour préserver l'indépendance et la souveraineté que nous avons conquises.
Vos Excellences :
Ce sommet est l'occasion de traduire en actions concrètes l'aspiration à progresser vers une région plus juste, plus solidaire et plus durable. Pour atteindre ce noble objectif, il faut incontestablement modifier l'ordre international actuel, injuste, irrationnel et exclusif.
Une restructuration profonde et globale de l'architecture financière internationale, contrôlée par quelques institutions qui profitent des réserves du Sud et appliquent des recettes à court terme pour reproduire leur schéma de colonialisme moderne, est nécessaire et urgente.
Le problème de la dette extérieure, qui a été payée plusieurs fois mais qui se multiplie, perpétuant le pillage financier et la dépendance économique des pays en développement, doit être résolu une fois pour toutes.
Les gaz à effet de serre atteignent des niveaux de concentration record. Dans les Caraïbes, nous sommes frappés par des ouragans de plus en plus dévastateurs. Nous devons agir sans plus attendre pour éviter une catastrophe climatique.
Le monde de l’après- pendémie est un monde plus divisé, injuste et inégal, où nous sommes confrontés à des crises multidimensionnelles dans les domaines de la santé, du climat, de l'énergie, de l'alimentation, de l'économie et de la finance qui nous touchent tous, en particulier les pays en développement.
Rien qu'en 2021, 828 millions de personnes souffriront de la faim, soit 46 millions de plus qu'en 2020 et 150 millions de plus qu'en 2019. Selon les estimations de la Banque mondiale, entre 75 et 95 millions de personnes supplémentaires basculeraient dans l'extrême pauvreté d'ici à la fin de 2022.
Combien de progrès pourraient être accomplis si au moins une partie des quelque deux mille milliards de dollars actuellement destinés à l'armement était affectée au financement du développement ?
Dans quelle mesure les inégalités, l'insécurité alimentaire, le chômage, l'analphabétisme et la pauvreté pourraient-ils être réduits si l'Agenda 2030 était soutenu par des actions concrètes en termes d'accès au marché, de financement à des conditions équitables et préférentielles, de renforcement des capacités et de transfert de technologies ?
En ces temps de crises multidimensionnelles qui pèsent particulièrement sur les pays du Sud et de tentatives incessantes de fragmenter notre unité, Cuba a assumé avec un engagement total la présidence du Groupe des 77 + la Chine. Nous assumons cette haute responsabilité avec la conviction que la solidarité et la coopération doivent prévaloir au service du développement.
La Conférence ibéro-américaine, par la promotion d'une coopération inclusive, peut et doit contribuer à la réalisation de cet objectif commun.
Nous nous félicitons de la désignation de Cuba comme siège de la XXIVe Conférence ibéro-américaine des directeurs de l'eau, que nous accueillerons en novembre 2023, à La Havane. À l'occasion de cet événement important, nous sommes disposés à mettre à la disposition de la communauté ibéro-américaine un programme de formation et de développement de capacités techniques spécialisées dans la gestion intégrée de l'eau, avec des cours de troisième cycle, des maîtrises et des doctorats dans les centres universitaires cubains.
Vos Excellences :
Le gouvernement des États-Unis s'obstine à déstabiliser notre pays et à détruire la Révolution cubaine. Depuis 2019, il a porté le blocus contre Cuba à une dimension extrême, afin d'infliger délibérément le plus grand préjudice possible aux familles cubaines, de semer le découragement et le mécontentement, et d'étrangler l'économie. Les dommages humains causés par cette politique, impossibles à quantifier, sont énormes et cruels.
S'il fallait une preuve de l'escalade de la haine comme politique de destruction de la révolution cubaine, le monde a pu la voir se déchaîner sans contrôle dans un cadre aussi noble et amical que devrait l'être une arène sportive. Ce fut un spectacle honteux, rendu possible uniquement par l'incitation active et la complicité des autorités politiques de la ville de Miami.
Pour le simple fait de représenter Cuba et parce que le match se déroulait dans un stade de cette ville, nos joueurs et certaines de leurs familles ont été harcelés sans aucune considération, lors de la demi-finale de la Classique de baseball.
En même temps, comme une insulte à la vérité et une offense à mon pays, qui est l'une des plus grandes victimes du terrorisme dans l'hémisphère occidental, l'inclusion injustifiée de Cuba dans la liste fallacieuse des pays qui soutiennent prétendument le terrorisme, publiée unilatéralement par le département d'État, est maintenue.
Il ne s'agit pas seulement d'un mensonge, d'une calomnie sans fondement. L'inclusion dans cette liste d'un pays dont la conduite de rejet ferme et de persécution de toute forme ou manifestation de terrorisme est irréprochable et reconnue, rend toutes nos transactions financières et commerciales et nos possibilités de crédit extrêmement difficiles.
Nous sommes reconnaissants du soutien précieux de l'Ibéro-Amérique, de ses déclarations rejetant le blocus et de ses demandes d'exclusion de Cuba de la liste arbitraire des États soutenant le terrorisme.
Face aux tentatives de l'empire de nous recoloniser et de nous imposer une culture et des modèles uniques, la région est unie, sous la direction de la CELAC, honorant l'engagement de la proclamation de l'Amérique latine et des Caraïbes comme zone de paix.
Nous réitérons notre ferme solidarité avec les gouvernements légitimes du Venezuela, du Nicaragua et de la Bolivie, soumis à des tentatives persistantes de déstabilisation. Parce qu'elle les a également subies et qu'elle en connaît les coûts humains, politiques et sociaux, Cuba condamne et rejette les ingérences qui fracturent le consensus.
Nous soutenons la revendication légitime de souveraineté de l'Argentine sur les îles Malvinas, Sandwich du Sud et Géorgie du Sud, ainsi que sur les zones maritimes environnantes.
Nous réaffirmons l'engagement historique en faveur de l'autodétermination et de l'indépendance du peuple de Porto Rico.
Nous réaffirmons notre engagement en faveur du processus de paix en Colombie, tout comme nous réaffirmons que le peuple frère haïtien a besoin de paix et de tout notre soutien, de plus de solidarité et de coopération internationale, sur la base du respect total de la souveraineté et de l'autodétermination de cette nation.
Notre reconnaissance à la République dominicaine pour les résultats remarquables obtenus au cours de ces deux années de direction de la Communauté ibéro-américaine. Nous souhaitons beaucoup de succès à la République de l'Équateur dans ses nouvelles fonctions de Secrétaire Pro Tempore.
Vous pouvez toujours compter sur Cuba dans l'effort de consolidation d'un monde plus juste, solidaire et durable, qui avance vers le développement et la prospérité de nos peuples, de nos frères de sang, d'histoire, de batailles et d'espoirs. Depuis ces territoires éblouissants de l'Amérique, qui ont inspiré à Alejo Carpentier l'idée du réel merveilleux, chaque fois que nous sommes ensemble, nous grandissons dans la certitude que nous pouvons.
Je vous remercie de tout cœur.
(Cubaminrex – Présidence de Cuba)